Coucou !
Le
mercredi 22 avril 2015, il faisait beau, le muguet était déjà là près du
portail et grignotait la petite allée gravillonnée menant à la maison.
Sur
la page de ce 22 avril la Loire se cachait derrière la levée. Ceci n’a pas
changé depuis ; en témoigne cette photo prises bien des mois plus tard.
Un
printemps de belle tenue fut suivi d’un été serein passé à réfléchir à rien
entre les rangs d’un jardin potager exigeant, capricieux parfois mais toujours
riche d’une naturelle générosité.
Les
visiteurs et autres passants semblaient y voir l’image du bonheur en ignorant
qu’un jardinier peut secrètement passer son temps à attendre le fruit du vœu
qu’il fit un jour en entendant le premier chant de coucou de l’année.
Que reste-t-il de tout
cela
Dites-le-moi ?
Un
proverbe dit : « On apprend à nager en hiver et à patiner en
été ». Il est vrai qu’en été, je patine, je patine, avec tout de même
suffisamment de bonheur pour me sentir fort capable de nager dedans en hiver,
d’oublier momentanément le coucou en lui donnant rendez-vous, s’il le veux bien,
au printemps prochain.
Tout
ça pour dire, pour se trouver une excuse, pour essayer de comprendre pourquoi
je n’ai rien écrit sur ce machin-blog (ni ailleurs d’ailleurs) depuis le
mercredi 22 avril 2015 qu’il y a peut-être une forme d’équilibre dans la
pratique d’activités saisonnières. Si le jardin, la terre et l’eau dorment en
hiver, la plume, l’encre et les notes s’activent à nouveau quand il retombe sur
nous. Sauf peut-être une ou deux chansons que je daterai en été par esprit de
contradiction.
Depuis
ce 22 avril qui n’a rien de particulier ni d’exceptionnel, j’aurais pu mourir,
par exemple, et mon blog n’en n’aurait rien su ?
Bien
entendu, en ce genre de circonstance, je ne peux pas compter sur mes lecteurs
qui se montrent presque totalement inexistants, mais plutôt sur un égaré de la
toile détourné de son chemin par un coucou malfaisant. Bref, le seul qui aurait
pu croire à ma mort et donc aujourd’hui à ma résurrection et dont j’ignore tout.
Pourquoi,
bon dieu ! Pourquoi ?
J’ai
des amis qui font le tour du monde en bateau et qui se sont battus contre des
vents déchainés dans les canaux de Patagonie chilienne tandis que Noël
s’approchait à grands pas. Ils trouvent le moyen d’écrire un journal, de nous
parler des livres et des moutons qu’ils dévorent, des longues escales
solitaires bloqués sous les falaises et les glaciers de la Cordillère et des
quelques mots de poésie qu’il leur suffit d’échanger dans ce vide silencieux
pour atteindre le secret bonheur de leur sentiment d’éternité.
Je
n’ai donc aucune excuse et si mon blog ignore ma mort, il faut bien l’avouer,
je m’en fous royalement !
Pourtant,
cher lecteur (soyons modeste, commençons par le singulier) il faudra vous y
faire : je remets le couvert aujourd’hui, je dresse à nouveau ma table de
lecture pour vous inviter au festin de mes élucubrations. Si vous avez enfin un
commentaire à faire, écrivez-le sur la nappe ou bien écoutez pour fêter nos
retrouvailles :
Surabaya
Johnny – Paroles de Boris Vian – Musique de Kurt Weill
Rochefort sur
Loire – Poème de René Guy Cadou – Musique de Jean-François Salmon